-...et c'est là que vous êtes arrivés.
Camille se tue et le sacrieur resta pensif le regard perdu dans le vide. Enfin, c'était ce que Maxime et les autres supposaient, car avec ses yeux sans pupilles, il était difficile de deviner où et comment il regardait. Camille venait de finir le récit de leur arrivée dans ce monde, s'il s'agissait bien d'un monde, et de leur rencontre avec les bandits riktus. Léo et Maxime avaient pris le relais à l'occasion, rajoutant des détails à son récit. Heren, car c'est ainsi que leur sauveur s'était présenté, leur avait demande de lui raconter ce qui leur était arrivé. Ils étaient tous assis sur des souches ou des arbres tombés dans la forêt, à une dizaine de minutes de l'endroit où les jeunes avaient été attaqués. Heren les avait conduit dans les bois, ne répondant pas ou par monosyllabe à leurs questions. Tout ce qu'ils avaient pu obtenir de lui était son nom, qu'il ne leur voulait aucun mal et que oui, il pouvait voir même sans pupilles. Simon, croyant qu'il était aveugle, avait même entreprit de le vérifier en faisant des simagrées devant son visage, mais l'homme voyait parfaitement bien et l'avait gratifié d'un regard assassin qui l'avait rapidement remis en place.
"Vous vous trouvez dans le Monde des Douze.
Les paroles d'Heren sortirent les jeunes de leurs réflexions, surpris de l'entendre dire une phrase de plus de trois syllabes.
-D'après ce que vous avez dit, vous êtes sortis du zaap au bout de la route, meme si j'ignore comment vous y êtes parvenu. Je ne sais non plus rien de ce monde que vous appelés Terre, et encore moins de ce que vous nommez Gatineau...
-Euh, attendez! s'exclame Maxime en se levant. C'est quoi le Monde des Douze? Qui étaient ces hommes bizarres en chapeau? C'était quoi le zaap dont ils parlaient? Comment est-il possible que vos tatouages se détachent de vos bras et bougent tout seul? Comment...
-Stop!
Maxime s'interrompit et se rassit sans dire un mot.
-Je veux bien répondre à vos questions et vous aider à savoir ce qui vous est arrivé, mais me cribler de questions ne sert à rien. Premièrement, le Monde des Douze est la planète sur laquelle vous êtes en ce moment. Elle est protégée par douze dieux qui ont tous des disciples.
-Vous croyez aux Dieux? l'interrompit encore Léo. Je veux bien croire que ce monde soit dans le Moyen-Âge, mais il y a quand même des limites! C'est quand même stupide de...
-Si vous ne croyez pas en eux, c'est votre problème, le coupa Heren en se penchant en avant. Mais d'après toi, qu'est ce qui fait que je puisse animer mes tatouages?
Heren se retourna vers Camille, laissant Léo essayer de comprendre ce que sa dernière phrase voulait dire.
-Comme je le disais, reprit-il, les disciples suivent la voie de leur Dieu et en retirent des capacités et des signes distinctifs. Pour ce qui est de l'endroit où nous sommes, nous sommes dans la Futaie trouée, une forêt de la nation d'Amakna, prêt d'un village ou je vais vendre des armes ou de la métallurgie.
-Et qui étaient ces hommes qui nous ont attaqué? Demanda Camille.
-C'était des bandits du clan des Riktus. Ce sont de simples détrousseur qui guettent les voyageurs sans défense qui passent par les routes, même s'ils sont devenus étonnamment actif ces derniers temps.
-Bon. Merci de nous avoir éclairé sur tout ça, commença Maxime, mais il reste qu'on a un gros problème à résoudre: comment va-t-on rentrer chez nous? Nos parents vont finir par s'inquiéter si on ne rentre pas bientôt et on a aucune idée de comment repasser par ce zaap, comme vous l'appelez.
Les jeunes terriens se tournèrent vers Heren, qui resta pensif, plongé dans ses pensées. Il resta un moment comme ça, les coudes appuyés sur ses genoux, sans rien dire, puis se redressa avant de prendre la parole.
-Je crois connaître quelqu'un qui peut vous aider, dit-il aux enfants.
Ceux-ci ouvrirent de grand yeux surpris et le fixèrent, l'incitant à continuer.
-Il s'agit d'un vieil ami xélor à moi qui fait des recherches sur les différentes dimensions, comme la shukrute. En plus de ses capacités sur le temps, il devrait pouvoir comprendre comment vous êtes arrivés ici et vous renvoyer.
-En bien qu'est-ce qu'on attend pour aller le trouver? Habite-t-il loin d'ici? demanda rapidement Maxime.
-Il habite dans le centre ville de Bonta, qui se trouve à quelques centaines de kilomètres d'ici. Mais ne vous inquiétez pas, on peut y arriver très rapidement avec un zaap! ajouta-t-il en les voyant commencer à paniquer. Mais avant d'aller le voir, il faudrait s'occuper de vos tenues.
-Qu'est-ce qu'elles ont nos tenues? tiqua Camille.
-Disons que ce n'est pas ce qu'il y a de plus commun ici, et ce ne serait pas la meilleure idée d'attirer l'attention. Nous allons donc passer par le village dont je reviens pour vous procurer des habits plus conventionnels.
La petite troupe se mît donc en marche sur le sentier, alors que les terriens s'inquiétaient un peu de la mode locale en observant les frusques rapiécées de leur guide.
___
-Vous êtes sûr?
-Mais oui, sa fera parfaitement l'affaire.
Maxime s'observa à nouveau dans le miroir devant lui. Le long pantalon de tissu foncé retenu par une ceinture en corde n'était pas trop dérangeant, mais la sorte de chemise sans manche fermée par de simples petits liens de fils lui faisait bizarre. Il était davantage habitué aux bons vieux chandails de coton imprimés. Il y avait aussi ces protèges poignets en bois qui, il l'espérait, ne devrait pas vraiment lui être utiles. Son petit ensemble était complété par des souliers de cuir étonnamment confortables, mais qui en auraient fait rire plus d'un au cégep.
"Je ne sais pas... J'ai beau penser que c'est comme ça que vous vous habillés ici, je n'arrive pas à m'y faire.
-Tu t'es déjà promené avec pire que ça quand ta grand-mère t'avait tricoté des pulls, non?"
Léo venait de sortir d'une des cabines d'essayage du magasin. Ses jeans avaient été remplacées par un long pantalon noir semi-moulant retenu par une ceinture grise fermée par une boucle en métal et disposant de bandes de tissus supplémentaires pour attacher divers objets, et des bottes noires avec une ligne blanche sur le dessus et une boucle argentée. Il revêtait aussi un plastron noir en cuir dont dépassait par-ci par-là des touffes de poils gris foncé ainsi que des épaulières du même type. Le tout lui allait étonnamment bien, même s'il lui donnait un air de mercenaire.
"Tu peux bien te moquer, répliqua Maxime, mais ce n'est pas moi qui me suit mis aux pantalons moulants.
-Ils ne sont pas si moulants que ça, et ils sont très confortables. La dame qui tient le magasin m'a dit que s'était habituellement davantage pour les roublards ou les srams, mais que ç'a m'allait bien.
-Si tu le dis.
Maxime se retourna vers Heren qui les attendaient à la porte.
-Maintenant qu'on est habillé, je crois qu'on peut aller retrouver Camille et les jumeaux non?
-Je pense qu'il nous manque encore un dernier petit quelque chose Max... ajouta Léo. Et je croit qu'Heren pourrait nous aider avec ça."
___
Heren, Maxime et Léo étaient maintenant revenus au magasin de vêtement ou ils avaient laissés Camille et les jumeaux pour qu'ils se procurent de nouveaux habits. Par contre, ne sachant pas à quoi ils étaient supposés ressembler maintenant, il était un peu difficile de les trouver. Heureusement pour eux, ils n'eurent pas à chercher très longtemps.
"Ah! Vous êtes là! Ça fait un moment qu'on vous attendait."
Camille arrivait, talonnée par Simon et Clara. Elle portait maintenant un gilet moulant noir accompagné d'une courte veste sans manche fermée par deux petits liens de tissus. Elle avait aussi un cuissard brun et une ceinture en cuir clair, le tout terminé par une paire de haute bottes en cuir. Quant à Clara, elle arborait une petite robe rose avec des cordons pourpres alors que son frère avait un simple pantalon bleu et un long chandail vert foncé avec une ceinture de tissu du même bleu que ces pantalons. Lorsqu'ils les virent, Maxime et Léo les fixèrent un moment, puis éclatèrent de rire. Heren conserva son stoïque, mais avait l'air tout aussi surpris que les garçons. La raison de leur hilarité était les étranges chapeaux que portaient leurs trois amis. Il s'agissait de large tubes de tissus qui leurs retombaient dans le dos, terminé par une touffe de poil et doté de deux petites cornes en tissus. Camille en avait un légèrement différent qui était coupe à la nuque.
"C'est bon! Arrêtez de rire, c'est vraiment pas drôle!
Les deux garçons hilares arrêtèrent de rire un instant, et repartirent de plus belle devant l'air outré de leur amie.
-Bon, arrêtez maintenant, les gens commencent à vous regarder.
Après un énorme effort de volonté, Léo et Maxime réussirent à contenir leur rire.
-Tu nous expliques la raison de ces couvre-chefs aussi... particuliers? Finit par demander Maxime.
-C'est de la faute à ton cousin et ta cousine! Après avoir acheté nos habits, on allait pour sortir du magasin quand ils ont vu ces drôles de chapeaux accrochés sur le mur. La couturière dit avoir eu cette idée en allant voir le meilleur match de boufbowl qu'elle ait jamais vu à Brakmar, mais que ce n'était pas très populaire. Évidemment, Clara et Simon en on voulu un, mais il a fallu qu'ils insistent pour que j'en prenne un.
-Et tu as accepté? demanda Maxime.
-Tu as déjà réussi à dire non à deux enfants qui te font des yeux tristes et sont à deux doigts de se mettre à pleurer? Répliqua-t-elle avec un regard entendu. Au moins la vendeuse me l'a raccourci, car jusqu'au dos, c'est bien trop encombrant. Et... minute! Qu'est-ce que vous foutez avec ces trucs?
Elle pointait l'épée qui pendait à la hanche de Maxime, celle dans le dos de Léo et les deux dagues à sa ceinture.
-Ben... Voulu commencer Maxime.
-On a trouvé qu'on pourrait en avoir de besoin. Si jamais on se retrouve dans une situation semblable à celle d'aujourd'hui, ça nous sera utile.
-Et vous avez décidé ça, comme ça, sur un coup de tête et êtes allés vous en acheter sans en parler avant?
Léo eu un sourire en coin et décrocha quelque chose du sac sur le dos d'Heren.
-En fait, c'est Heren qui a accepté de nous les prêter ou de nous les procurer. Et ne t'inquiète pas, on a aussi pris quelque chose pour toi.
Il lui lança ce qu'il avait pris, et Camille attrapa l'arc en bois et le carquois de flèches, toute colère envolée.
-Je sais que tu te débrouilles vraiment pas mal au tir à l'arc à l'école, ça pourrait servir.
Camille le regarda un moment, puis passa la courroie de son carquois par-dessus sa tête et mis son arc en bandoulière.
-Et nous, on a rien? S'exclama Simon.
-Alors là, pas question! rétorqua Maxime. Vos parents me tueraient s'ils apprenaient que je vous ai donné des armes.
-Bon, dit Camille en se tournant vers leur ami sacrieur et ignorant l'expression boudeuse de Simon, maintenant qu'est-ce qu'on fait?
-Il est trop tard pour retourner au zaap, nous allons nous trouver des chambres à l'auberge et partirons demain matin."
La petite troupe fraîchement équipée entra dans un bâtiment avec écrit sur son enseigne "Au bon voyageur". Ils y mangèrent un repas étonnamment savoureux de soupe, de pain et de fromage et allèrent ensuite dans leur chambre. Heren en avait demandées trois: une pour lui, une pour Camille et Clara et une pour les trois autres garçons. Les pièces étaient simplement meublées de lits, de tables de chevets et de commodes. Dans leur chambre, Léo et Maxime discutaient, alors que Simon s'était rapidement assoupi.
-Qu'est-ce que tu penses de tout ça toi? Demandait Léo. De ce qui nous arrive. C'est quand même tiré par les cheveux comme histoire.
-J'en sais rien. J'ai de la difficulté à y croire et à l'accepter, mais comment ça pourrait ne pas être réel? On est bien réveillé et on vit bien tout ça.
-Et pour le truc que tu as fait contre le bandit. Tu as compris c'était quoi ce machin bleu que tu as fait apparaître?
-Je suis même pas certain que ce soit moi. Bon, ça ne pouvait certainement pas être le bandit vu la tête qu'il a fait, mais je n'ai aucune idée de ce qui s'est passé. Durant ses explications, Heren n'en a pas parlé et il m'avait l'air surpris de me voir faire apparaître ce truc alors je doute que se soit quelque chose de commun.
-Ce serait pas normal de rester indifférent en voyant quelqu'un faire sortir des cercles bleus de nulle part quant même. Mais bon, on verra pour ça plus tard, le plus important est de trouver comment rentrer chez nous. Espérons que l'ami de notre sauveur pourra nous aider.
___
Bonta la divine, nation de commerce, de culture et de justice. Son centre-ville déborde de marchand, de magasins et d'havre-sacs étendus sur le bord de la route afin de mettre en valeur les objets que l'on souhaite vendre. Le marché de Bonta ne dort jamais, toujours rempli d'acheteurs et de vendeurs qui désire acquérir ou se départir de divers objets. On peut y trouver de tout, même d'un ami... et aussi d'un ancien ennemi qui a une forte envie de se venger pour diverses raisons personnelles.
C'est dans ce lieu de grandeur et de beauté qu'Heren guide les terriens au travers de la foule. Les jeunes avaient de la difficulté à le suivre, obnubilés par ce qui se trouvait autour d'eux : les bâtiments, les étals de vente et les personnages étranges qui les entouraient. Ils hésitaient à jouer des coudes pour avancer, même si personne ne s'en souciait dans ce fouillis. Une fois qu'ils eurent distancé le centre-ville où ce trouvait le zaap principal de Bonta, ils purent avancer plus facilement et rattraper leur guide tatoué. Ils devinèrent qu'ils approchaient de leur destination lorsqu'ils se mirent à croiser de plus en plus souvent des hommes en armure argenté portant le symbole de la nation.
Ils arrivèrent devant un grand bâtiment portant en grand les armoiries de la nation: le poste des gardes. C'était là que se trouvait le bureau de l'ami d'Heren qui devrait pouvoir les aider. Ils entrèrent à l'intérieur et suivirent leur ami sacrieur dans les couloirs, celui-ci semblant connaitre très bien l'endroit. Ils s'arrêtèrent devant une double porte de bois portant l'inscription "Capitaine des gardes : Raxo". Heren toqua à la porte et suite au marmonnement qui leur répondit, l'ouvrit. Les jeunes découvrirent un large bureau bondé de classeurs à paperasse, de tables remplies d'artefacts et d'outils scientifiques divers. Au milieu de la pièce, devant une large fenêtre éclairant le tout, se trouvait un large bureau de bois recouvert de piles de documents. Une main en dépassaient, pointant aléatoirement vers l'un des coins de la pièce alors qu'une voix impérieuse leur parvenait de derrière le meuble:
"Si c'est encore un autre dossier "urgent" ou une requête "d’extrême importance" mettez la sur une des piles avec toutes les autres, je n'ai pas le temps!
-Et pour parler un peu avec un vieil ami, tu en as?
La main s'immobilisa aussitôt. Une faible aura bleutée éclaira l'arrière des livres et le bras monta, suivit d'une tête et d'épaule qui dépassèrent la hauteur des dossier pour voir qui parlait.
-Heren! Ça t'en as pris du temps pour te décider à passer me voir!"
Le nouveau personnage s'envola littéralement de derrière son bureau pour passer par-dessus et atterrir devant le sacrieur pour lui donner l’accolade. Les jeunes, quant à eux, dévisageaient le chef des gardes. Il était de la même taille que leur sauveur, quoiqu'un peu moins large d'épaule. Il portait une très étrange armure composée de différents morceaux de métal placés sur son corps. Ses yeux se résumaient à deux ronds bleu luminescent. sur ses bras se trouvaient d'étranges éléments mécaniques dont irradiait la même lumière que ses yeux par divers endroits. Le reste de son corps qui n'était pas couvert par cet étrange attirail était recouvert de bandages, comme ceux d'une momie, mais en plus frais. Les deux amis se séparèrent et le xélor s'intéressa à ceux qui accompagnaient le sacrieur.
"Mais dis moi, qui m'as tu amené?
-Eh bien Raxo, c'est une très longue histoire.
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AU BOULOT!!!
(Cegy est un devin mais ça, on le savait : il prévoit la suite de son histoire alors que clinquantes lecteurs se trompent deux fois sur trois)