L'histoire d'Eraldiel - Les Carnets 6 abonnés

Par Eraldiel

Eraldiel se réveilla doucement. Il n'ouvrit pas tout de suite les yeux et profita de la tièdeur du lit. Il avait toujours apprécié l'état de 'demi-sommeil', qui lui semblait bien plus réparateur que le reste de la nuit passée. Qu'avait-il à faire aujourd'hui ? Peut-être enfin débuter sa carrière de Paysan, puis de Boulanger ? Hmmm...Oui, cela l'intéressait. Il savait où trouver le Chevalier Justice, un Maître des Champs. Par contre, il ne savait pas où trouver un Maître Boulanger mais il ne se faisait pas de soucis. Il n'aurait qu'à demander poliment l'information à des citoyens plus anciens.
Il se retourna dans son lit.

De plus, ce soir, c'était le 'grand' soir. Il allait être confronté aux compagnons de Fideus pour tenter de faire partie de sa guilde. Il semblait plutôt joyeux à cette idée; se faire enfin des amis à Bonta le réjouissait ! Le rendez-vous de ce soir devait être la chance de sa vie. Il s'était d'ailleurs entraîner longuement la veille pour tenter de convaincre les recruteurs qu'il saurait se révéler utile dans leurs aventures. A présent, il pouvait soigner des griffures de Chachas à la perfection !

Il se leva de son lit et se rhabilla. Il accrocha sa cape et enfila ses bottes puis sortit du Havre-Sac. Il faisait toujours froid mais le vent était moins présent que la veille. Il se dirigea vers les grilles du territoire de Géror en regardant le ciel blanc. Il passa la frontière du Village et arriva sur le Pont Marchand du Faubourg de la Sainte-Eau Dorée. Le premier banc était occupé par un Pandawa, absorbé par la beauté de Nina Richa, le Membre de Clan du territoire et accessoirement une excellente Tailleuse. On pouvait souvent l'entendre parler de Jean-Trool Grospied, un rival. Eraldiel cessa de regarder Nina Richa soudainement, voyant que sa jupe était soulevée par le vent. D'autres n'en firent pas cas.

L'Eniripsa tourna donc sur sa droite pour arriver aux Champs de Cania. Il remarqua que, dans l'ensemble, il y avait tout de même beaucoup de paysans travaillant malgré le froid et la neige. Comme si cela ne dérangeaient pas la poussée des différentes cultures comme le blé, l'orge ou les tuberbulbes. Il s'approcha du Chevalier Justice, en évitant le maximum de flaque de boue. Le Membre de Clan des Champs de Cania lui prêta alors attention. Eraldiel lui demanda poliment de lui enseigner le métier de Paysan. Justice répondit par l'affirmative. Il lui donna d'abord un livre et deux consignes. La première était de lire le présent livre et de l'apprendre par coeur. La seconde était de revenir passer un test de connaissances.

Eraldiel ne se fit pas prier pour ouvrir le livre et découvrir que seulement deux pages étaient remplies. Les informations contenues ne l'aidaient pas vraiment à en savoir plus sur ce métier qu'il connaissait déjà un peu. Prit d'inquiètude pour le test qui allait suivre, il relut les deux pages trois fois. Fin prêt, il retourna voir Justice. La première question fut d'une consternante facilité. La seconde fut du même accabit. La suivante fut d'une simplicité rare. La quatrième ne lui posa aucun problème particulier. Il décrocha son permis et une faux toute simple en guise de récompense. Très souriant, il prit congé du Chevalier Justice.

Une journée qui commençait bien !

Il aborda ensuite une jeune Disciple de Xélor, lui demandant, toujours avec la politesse habituelle, vers qui il devait se tourner pour devenir Boulanger. Elle cita le nom de Macrobio avant de repartir à toute allure, visiblement pressée. Pour Eraldiel, le nom de Macrobio ne signifiait rien. Il demanda à un autre passant Disciple d'Osamodas. Ce dernier prit le temps de lui indiquer le chemin du Pont de la Galette. Sur un remerciement chaleureux de l'Eniripsa, ils se séparèrent.

Il traversa les Plaines de Kara, ayant une teneur en boue moins importante que l'autre chemin possible : les Marais de Cania. Kara avait un paysage sympathique, mais il ne s'attarda pas. Bien vite, il se retrouva devant Macrobio, sur le Pont de la Galette. Alors que celui-ci jouait avec des fioles, Eraldiel l'interrompit. L'interpellé tourna sa tête vers l'Eniripsa et une petite détonation se fit entendre : le contenu de la fiole venait de se jetter à la figure de Macrobio. Eraldiel mit une main devant sa bouche, de surprise.

<<Excusez-moi. Êtes-vous blessé ?

Ne t'inquiète pas, ça arrive souvent.>>


Il s'essuya le visage avec un chiffon puis posa sa fiole. Il se tourna vers Eraldiel, demandant implicitement ce qu'il désirait.

Etrangement, le métier de Boulanger ne fut pas très difficile à apprendre. Le test de connaissances fut une vraie partie de plaisir et l'Eniripsa décrocha son permis d'exercer avec brio. Saluant une dernière fois Macrobio, l'Eniripsa retourna dans les Plaines de Kara, passer un peu de temps à admirer, sans aucun guide malicieux, la beauté de la nation.

Vers dix-sept heures, il s'approcha du Village des Vents pour s'assurer d'être à temps au rendez-vous. Il entra alors dans son Havre-Sac pour être présentable. Après avoir simplement remit ses cheveux en place sous sa coiffe du tofu et quelques plumes dans le bon sens, il ressortit. La nuit tombait peu à peu derrière lui. Il s'assit sur un banc pour patienter, mais il ne dut pas s'apercevoir qu'il s'endormait déjà.

Une douce caresse sur la joue le réveilla. Il entrouvrit les yeux et crut voir ceux d'un chacha. Ce qui eut pour effet de le ramener à la réalité. Il sursauta et se leva d'un bond. Fideus le regardait en s'amusant et ramena sa propre main le long de son corps. l'Eniripsa reconnut enfin l'Ecaflip et se calma quelque peu : non, ce n'était pas une attaque de chacha. Fideus, sans un mot, fit un signe de tête pour l'inciter à le suivre. Sous ses vêtements fabriqués en bois d'abraknyde, Fideus ne ressentait pas le froid de la même façon.

Evidemment, il faisait nuit à présent et Eraldiel était proche de son guide pour ne pas le perdre de vu. D'ailleurs, l'Ecaflip lançait sa pièce en l'air.

<<Face. Hum...Tant pis...Pour une autre fois..., murmura-t-il.>>


Fideus regarda l'Eniripsa à ses côtés et lorgna la main qui se balançait d'avant en arrière à mesure que leurs pas les menaient vers leur destination. Malgré son envie de la saisir, il se retint. Il rangea sa pièce et sa main dans sa poche.

Le Village des Vents portait bien son nom ce soir là. Une lumière se distinguait non loin, et c'était vraisemblablement l'endorit prévu. Les deux compagnons arrivèrent près du feu de camp, où une marmite d'eau bouillait tranquillement. Le silence les accueillit. Ils étaient trois assit autour du feu.

Une Eniripsa, blonde et aux yeux bleu. Elle portait de la laine de bouftou, des bottes à la cape. Elle le foudroya du regard, en guise de bienvenu.

Un Crâ, aux cheveux plutôt de couleur noire. Ses vêtements ressemblaient étrangement à ceux du Chevalier Justice et étaient impeccables. Il ne le regarda pas, en guise de bienvenu.

Un Enutrof, d'un âge avancé, avec des mèches rousses. Il portait des vêtements de même couleur que ses quelques mèches. Des poils de Prespics, certainement. Il lui adressa un regard bienveillant en guise de bienvenu.

La Disciple d'Eniripsa se leva. Avec le reflet du feu, on pouvait voir qu'elle avait une grâce et une beauté naturelle. Malheureusement, l'expression hautaine de son visage, voire méprisante à l'attention d'Eraldiel, la rendait moins désirable. Elle s'approcha de lui, lui tourna autour pour l'examiner. Eraldiel ne bougeait pas, ne se sentant pas menacé, bien que peu rassuré.

D'un ton impérieux, elle lui demanda son nom. Lorsqu'il réussit enfin à le bredouiller, elle déclara qu'il était moche, et imprononçable. Elle annonça qu'il s'appellerait maintenant "Bob". Non, en fait, plutôt "Bobby", car il était petit. Elle lui posa la question de ses qualifications. "Bobby" se déclara bon soigneur et soutien de bonne foi. Elle voulut le vérifier.

L'Eniripsa prit une fiole à sa ceinture, couverte de piquants. Sans crier gare, elle la lança sur Fideus qui ne put l'éviter. Il laissa échapper un petit bruit avant de chanceler. L'Ecaflip toucha sa blessure à la tête : du sang. Le Crâ et l'Enutrof avaient eu l'air supris, mais ne bougèrent pas.

<<Là, c'est sûr, c'est plus moi qui ait besoin de soins, c'est elle...!>>

L'Ecaflip semblait souffrir, mais Eraldiel sortit sa baguette et murmura une cascade de mots pour l'aider. La plaie se referma doucement. L'autre Eniripsa le jaugea du regard et l'observait travailler. Fideus remercia Eraldiel, qui répondit qu'il lui en priait, mais la femme coupa court à ces politesses.

<<Je suis Mysthys. La Meneuse de la guilde Shibia. Tu nous appelleras tous, j'ai bien dit, TOUS, Maître. C'est une marque de respect, qui, quand elle est absente, peut te conduire à de gros ennuis. Compris, Bobby ?>>


Bobby articula un petit "oui".

<<Oui, qui ?

Oui, Maître Mysthys.>>

Semblant heureuse des bases sur lesquels partait le petit nouveau, elle lui tourna le dos.

<<Bien. Présentez-vous, les autres. Moi, j'ai autre chose à faire. Fideus, tu vas venir me voir tout de suite.>>

Son ton ne laissait aucune place à la discussion. Mais Fideus lança sa pièce avant de répondre. Face. Il soupira et la suivit avec un regard pour les autres.
L'Enutrof se leva pour indiquer à Eraldiel de prendre place. Il s'appellait Ghurn et ne lâchait que très rarement son kama. Il était bien moins froid que sa Meneuse et il avait des regards bienveillants pour tout le monde. Certainement un avantage de son grand âge.

Le Crâ se prénommait Bardop et ne se prenait pas pour n'importe qui. Il se présenta en tant que Bras Droit de Maître Mysthys, de Cercle de Puissance élevé, d'une fidélité sans faille, d'un aplomb sans égale, d'une intelligence rare...Heureusement que Ghurn l'interrompit dans sa litanie. Eraldiel n'appréciait que moyennement les vantards et orgeuilleux, mais ne souhaitait pas être désobligeant envers cette personne qu'il ne connaissait pas encore vraiment.

Ils ne posèrent qu'une seule question à l'Eniripsa avant que l'Ecaflip ne revienne. Notamment sur l'efficacité de ses soins : ils doutaient grandement de sa capacité à soigner convenablement. Le pauvre Eraldiel ne sut pas quoi répondre, sachant qu'il avait usé de son meilleur sort. Il vallait mieux garder cette information pour lui. Il irait s'entraîner dur tout les jours !

Fideus revint vers eux, seul. Il annonça qu'Eraldiel était accepté dans la guilde. Sur quelques félicitations de Ghurn et le visage impassible de Bardop, il informa également Eraldiel qu'ils allaient fêter son admission à la taverne de la Bagrutte. Les deux autres refusèrent catégoriquement. Bardop prétexta que Maître Mysthys leur avait demandé de rester ici. Ghurn se disait fatigué ce soir.

<<Tu vas avoir des ennuis, Fid, ajouta le Crâ.

Ce ne sont pas tes oignons, Ba, répliqua-t-il avant d'emporter Eraldiel par le bras sans lui demander son avis.>>


L'Eniripsa ne tenta même pas de discuter : cet Ecaflip semblait vraiment décidé à tout mettre en oeuvre pour se retrouver avec lui. Par contre, il se demandait si c'était une bonne chose, à présent...Page précédentePage suivante