C’était un bel automne, un jour comme le Monde des Douze n’en avait connu depuis longtemps. Les feuilles ne tombaient pas encore, les champs étaient plein de blé d’or à point pour les récoltes, la faune et la flore resplendissaient. Le soleil brillait comme en début Jouillet. De l’hiver, point de trace, sinon à Frigost. L’été semblait éternel dans le cœur des enfants. Ce long été rassurait les paysans, arrangeait les politiques et les comploteurs. Un bel été présage un hiver encore plus rude, clamaient les dictons populaires, et cet hiver commençait depuis plusieurs années derrière les méandres de la politique.
La salle du gouvernement de Brâkmar était pleine ce jour-ci. Et l'heure n'était pas aux plaisanteries (régulièrement agrémentées d'un tour à la taverne). Tous les membres éveillés l'avaient bien compris. La décoration de la salle qui seyait tant aux gouvernements successifs que ceux-ci ne l'avait jamais changé d'un poil depuis le premier gouverneur (surnommé le Barbare) n'égayait même plus les visages qui écoutaient.
Au bout de la table s'asseyait le gouverneur, Wayter. Cet écaflip qui avait depuis longtemps perdu de vu sa jeunesse régnait avec talent et l'habituelle tyrannie. Paranoïaque et pingre, on le prenait pour un énutrof déguisé. À sa gauche se trouvait Gorgan, son bras droit et neveu. En symétrique de Gorgan, Joer dormait à moitié. En tant que Général des Soldats, ce iop ne travaillait presque pas et donnait à ses subalternes des libertés totales. Ses voisins calquaient plus ou moins leur attitude sur la sienne, à deux exceptions : Kirabi, le Challengeur dissertait sur les différentes bières et invitait ses collègues à l'aider à louer des tonneaux pour faire des mélanges originaux. Le plus étrange était sans doute que cette alcoolique n'était pas un pandawa mais un sadida. Il connaissait par contre pas mal de membres de la première classe.
L'autre exception notoire se nommait Rhigalt, Chef des Gardes et très grand disciple de Xélor. Alors que son homologue Général débutait une fameuse symphonie de ronflement, lui restait attentif aux mots de son Gouverneur tout en tentant de faire taire le Challengeur sans attenter à sa vie, chose fort difficile. Wayter achevait son discours d'entrée :
«Mes chers collègues, maintenant que je vous ai résumé les ordres du jour, entrons dans le détail des rapports. Gorgan, c'est à toi de commencer.
-Chers camarades permettez moi de vous lire le compte rendu de nos chroniqueurs afin de vous faire comprendre la gravité de la situation :
"Sur Sufokia, les gardes s'entraînent de plus en plus. Les associations du Wakfu ne cessent de se plaindre du massacre des requins, qui...
-Des requins tués? C'est ça la menace, ironisa le Général avant de retomber dans son sommeil.
-"...massacre des requins, qui sont étranglés à mains nue". La Garde Sufokienne tue des quantités incroyable de requins pour s'armer avec leurs crochets et leurs dents-lesquelles font des ravages, dois-je vous le rappeler Général, rétorqua le vice-gouverneur.
-Inutile, il dort. Continue, s'il te plaît, répondit son oncle.
-Le plus alarmant dans ce début de rapport est qu'ils les tuent à main nues! Or vous connaissez la résistance de leurs peaux.
-En effet, répondit Rhigalt. Pour avoir déjà affronté des soldats et quelques gardes sufokiens, je peux aisément vous dire que leurs vêtements en peau de requins sont bien résistants, tant à la magie qu'aux lames. Et souple par dessus le marché!
-Très bien résumé, remercia Wayter. Continue Gorgan.
- Je reprends la suite de la lecture : "Et c'est cette même Garde qui est dirigée par le prédécesseur de notre Chef des Gardes, bien justement surnommé Carnages. Avec un chef d'une telle rigueur, la réputation de cette Garde risque fort de monter en flèche. Des ragots qui courent ne rassurent pas quant à l'armée : on prétend que les gardes préparent un armement d'une sophistication inédite. La limite entre rumeurs et réalités à propos de cet armement est floue, aussi ne décrirais-je dans ce rapport que les faits que j'ai pu voir de mes yeux : les marteaux des forges féca frappent jour et nuit, de très grande quantités de métaux rares arrivent et plusieurs grands maîtres viennent finaliser eux-mêmes les raccords et l'aspect extérieur. Si je n'étais pas si sur de la puissance de notre armée, je craindrais pour Brâkmar en cas de guerre." Pas très rassurant vu l’antipathie de Sufokia pour Brâkmar.
-Antipathie réciproque, remarqua Wayter.
-Je me permets d'objecter, risqua le Chef des Gardes. Ainsi que l'a démontré notre dernier conflit, leurs équipements ne sont pas conçus pour de grandes chaleurs, forges féca ou pas. Sur notre territoire nous restons maîtres mais je reconnais volontiers qu'en dehors de nos contrées nous serions désavantagés.
-Encore juste, félicita Wayter. Rien sur l'Armée Sufokienne?
- Juste une phrase, repéra Gorgan. "On dit aussi que leur Soldats s'entraînent de la même façon et que les deux corps pourraient être réunis."»
En entendant ces mots, son oncle fit une grimace et Rhigalt fronça les sourcils. Même Joer se réveilla, manifestement inquiet. Tyuer, l'énutrof Trésorier, tenta de positiver :
«La réunion de ces deux corps entraînera des dépenses astronomiques!
-Une guerre en rapporte bien plus, glissa le Chef des Gardes.»
Cette phrase combinée à l'annonce précédente réveilla pour de bon les endormis, et un rapport presque identique sur Bonta ne fit que les éveiller encore plus.
«Et Amakna, nos alliés? demanda Joer
-Hélas, un nouveau Gouverneur est monté sur son trône sous le nom de Moiq. C'est un maladroit qui risque de ruiner sa nation et notre alliance.
-En bref, si guerre il y a nous serons perdant, récapitula le Challengeur.»
Pour toute réponse, Wayter, Gorgan et Rhigalt hochèrent gravement la tête.
La salle était vide à présent. Seul Wayter et son neveu étaient restés :
«Mon oncle, exception faite de Rhigalt, pourquoi garder ces membres là? Ils sont alcooliques et passent leur temps à dormir.
-Ils sont manipulable. De plus, leurs seconds sont choisis par mes soins. Tu en penses quoi?»
Gorgan sourit :
«Que j'aurais du y penser. Mais dans ce cas, pourquoi Rhigalt? C'est un personnage impossible à cerner.
-Certes, mais il est si efficace que notre Garde se porte mieux que jamais. Je dois reconnaitre que je ne pourrais pas faire mieux moi-même. Et puis il a des connaissances sur les armées ennemies hors du commun. Ainsi que des fidèles dans le monde souterrain, biens utiles quelques fois.
-J'ai passé sous silence une phrase importante dans le rapport sur Bonta, avoua Gorgan après avoir acquiescé. "Leur Garde et leur Armée cherchent à retrouver la légendaire Crocobur. Je souhaite que cela n'arrive jamais vu sa puissance."
-Vraiment inquiétant.
-Plus ou moins, nuança une voix qui ne venait d'aucun des deux écaflips.»
Rhigalt venait de rentrer :
«J'ai oublié ma bourse pour un achat, l'auriez-vous vue?
-Qu'avez-vous entendu, exigea le Gouverneur avec un air contrit.
-Que Bonta cherche la Crocobur. En tous cas, je vous rassure. Je suis moi aussi en bonne voie pour retrouver une arme mythique. Une aiguille de légende. On dit que Xélor lui-même la magnait avant de la perdre.
-Et c'est?
-La Lame du Temps. L’Aiguille de Xélor. Fatale.»
Page suivanteDerniére modification le 13/08/13 é 09:29
Liste des principales mises é jour :
20/07/13 - Fin de ce premier Carnet!
Ceci est ma première fan-fiction. J'espère que vous l'apprécierez, et que vous passerez un bon moment en la lisant!
Si vous vous reconnaissez dans des personnages, je tiens à préciser qu'aucun d'entre eux n'est une caricature d'un joueur.
Bonne lecture!
PS : je suis ouvert à tout type de commentaires, mélioratifs ou non, sur le BG ou le scénario, etc. Dire que je suis un génie n'est pas interdit :p